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Petite chose insignifiante.

J 32 du confinement.

Tel Icare ( fin №1)

J’arrivais dans l’appartement, stressée, en retard.

Je savais qu’il était dedans, je l’entendais marcher. Malgré ce, je ne comptais pas reporter le travail qui m’avait été commandé.

Portable à la main, il arpentait la chambre à grandes enjambées.

Massif dans sa robe de chambre en soie sauvage, il faisait tout pour ressembler à un mafieux de série B, prenant des airs à la Tony Montana ce qui, convenons en, était à la limite du ridicule.

Tout en lui respirait la vulgarité: Son peignoir béant sur un torse velu laissait apparaître une “dookie chain” cliquetante à souhait qui aurait fait pâlir d’envie Cash Money & Co; chaîne assortie, cela s’entend, aux boucles qui ornaient le lobe de ses oreilles.

Ce quinqua à l’allure “has been”, aux traits grossiers, aux cheveux huileux plaqués sur la nuque prenait des poses: une authentique caricature.

Une impression désagréable se dégageait de ce personnage que je voyais pour la première fois.

Pendu à son téléphone, il beuglait comme une bête. Par intermittence des ”non Momo! oui Momo!” s’échappaient du “handy” sur lequel le haut parleur, comble de la discrétion, fonctionnait à pleine puissance.

Il parlait français, je ne m’étais pas trompée de porte, j’étais dans la bonne suite. Sa main libre qui tenait un verre de champagne à moitié plein, s’agitait en permanence laissant penser que j’avais à faire à un homme du Sud.

Sur la table basse du salon, attendait une seau à champagne ainsi qu’un pic à glace destiné à briser les blocs fraîchement sortis du minibar.

Posée ostensiblement à côté, une enveloppe entrouverte “dégueulait” une quantité respectable de grosses coupures.

Il n’avait pas prêté attention à moi.

Je n'avais pourtant rien de l’escort qu’il avait l’air d’attendre.

Ma mise discrète: pas de décolleté provocant, jupe mi mollets plus proche de la tenue de travail que de la panoplie d’une hétaïre ne pouvait en rien déclencher la concupiscence.

Je restais là dans l’entrée, les bras ballants, ne sachant que faire. Pressée tout de même de finir ce pourquoi j’étais rentrée dans cette suite.

Lorsqu’il daigna enfin prendre en compte mon existence, il eut l’air terriblement excité, sans doute venait il de consommer un rail de cette poudre blanche qui maculait la table basse.

Ce genre de pervers, quand il se retrouve seul avec une femme devient aussitôt une sorte de "bête sauvage" capable de se laisser tenter même par une femme comme moi. Avec son sale argent, ce personnage répugnant se pensait bourré de sexappel et entendait bien bénéficier d’une sorte de “droit de cuissage”.

D’un air qu’il voulait séducteur et désinvolte, il sortit une bouteille qu’il posa sur la table et esquissa alors un geste impératif pour que je m’approche.

Visiblement il avait l’habitude de se faire obéir et bien qu’il n’ait proféré la moindre parole, son attitude était suffisamment explicite.

“Momo” n’était pas très psychologue, ce genre de comportement a eu le don de me braquer, je le fixais avec attention, furieuse.

C’est alors qu’il ébaucha un geste.

Immédiatement la pauvre femme que je suis s’est précipitée sur le pic à glace.

Je ne me reconnaissais plus.

Je l’ai alors lacéré avec cette arme improvisée.

Étrangement sereine malgré la violence de ce qui venait de se passer, je n’ai pas perdu mon calme, je suis restée lucide, ai lavé méthodiquement mes mains, emballé dans un linge le pic ensanglanté et … opportunément empoché l’enveloppe de billets.

Prise d’une illumination, j’ai laissé sur place la paire d’escarpins oubliés par la française dans la chambre 432.

Respirant un grand coup pour me calmer, je suis sortie de la chambre à pas mesurés, poussant mon chariot et claquant la porte derrière moi.

Respectant fidèlement mon planning, j’entrepris de nettoyer de fond en comble la chambre d’à côté, libre depuis le départ des “suédois.”

En bas, dans la rue, nos trois petits frenchies faisaient la queue devant la caisse du “Venetian” commentant les péripéties de leurs parties de la veille.

Ils ignoraient que la dette de jeu de Hugo venait de s’éteindre à ce moment là.

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