Phylloxera
Etienne était particulièrement vaillant,curieux et motivé. Engagé comme porteur, il avait fini à la vinification, à la cave.
Là, il entendait les conversations entre son patron et les négociants. Tous les échanges portaient sur les ravages du phylloxéra. La survenue massive d'un puceron provoquait le dessèchement des sarments et des feuilles ,désorganisant totalement le vignoble.
Le parasite était encore peu présent dans la région, il fallait se préparer à son arrivée imminente.
Pour l'instant, le patron se félicitait de la présence de ce fléau sur l'Est du territoire car les prix montaient.
Sa survenue dans le Gard avait fait flamber le cours du vin.
A la fin des vendanges deux solutions s'offraient aux propriétaires : replanter progressivement tout leurs domaine ou sulfuriser les pieds de vigne existants.
Etienne ne remonterait pas chez lui de si tôt, il allait jour après jour, muni d'un long pal métallique , injecter dans les racines des souches le fameux sulfure de carbone.
Travail fastidieux et épuisant mais bien rétribué.
Si bien, qu'au printemps, entre les vendanges, la sulfurisation et la taille, il retournait chez lui nanti d'un petit pécule.
Il arrivait à la borie au bon moment,les travaux des champs: foins et moissons étaient en demande de bras jeunes et vigoureux.
A la pause de midi, une fois le casse croûte englouti,ça parlait avec les jeunes de la "montagne". Surtout avec les puînés qui savaient très bien qu'ils n'hériteraient pas des terres, que leur avenir n'était pas ici.
Ils palabraient, échafaudaient ensemble des stratégies. s'ils "descendaient” vers les plaines, Etienne qui était déjà introduit, servirait de tête de pont.
Avec les formes, maintes circonvolutions et palabres, il fit le siège du vieux Barthès qui n’avait toujours pas débloqué la dot promise pour le mariage de Louise.
Acculé ne pouvant plus reporter le versement , le beau-père avait cédé.
Possesseur d’une petite fortune, à la tête d’une petite armada de mountagnols, il avait, gonflé à bloc, repris, le chemin des riches plaines.
Avec lui “descendaient” les Calvet, Costes et Rouanet de la Salvetat rejoints par Combes et Vidal de Nages ainsi que Bousquet et Granier du Banès.
Il l'avait promis à Cazouls, il se faisait fort de leur trouver travail et avenir.
Sitôt arrivé,il s’était précipité (enfin pas trop car il ne fallait pas attirer l’attention.) chez Castelrine “le Garrel” : courtier en vins, maquignon, marchand de biens et prêteur sur gage, avec qui il voulait se “mettre” en cheville.
Il lui avait longuement expliqué ses projets comptant dans les années à venir sur son soutien.
En attendant la vendange proche, la fine équipe avait investi avec l’accord du propriétaire,une grangette à la sortie du village au bord du ruisseau de Monrecobre.